Archives de catégorie : Activités militantes

Synode catholique sur les Jeunes

Le document préparatoire (lineamenta) de la XVe assemblée du Synode des évêques qui se déroulera en octobre 2018, sur le thème « des jeunes, de la foi et du discernement des vocations », lançant « la phase de consultation de l’ensemble du Peuple de Dieu », étant membre de ce peuple, je propose la contribution qui suit :

« Je vous dis cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit complète » (Jn 15,11). Le texte indique que « tel est le projet de Dieu pour les hommes et les femmes de tout temps et donc aussi pour tous les jeunes hommes et les jeunes femmes du IIIe millénaire, sans exception. » [1] C’est donc également le projet de Dieu pour les jeunes homosexuel-le-s de ce millénaire. Mais comment l’Église catholique pourrait « accompagner [ces] jeunes à reconnaître et à accueillir l’appel à l’amour et à la vie en plénitude » [1] en ayant un langage injuste envers l’homosexualité :

  • en excluant les jeunes hommes homosexuels de la prêtrise au motif infondé que « ces personnes se trouvent dans une situation qui fait gravement obstacle à une juste relation avec des hommes et des femmes » (n° 199 de Ratio fundamentalis institutionis sacerdotalis)
  • en considérant qu’il n’y aurait « aucun fondement pour assimiler ou établir des analogies, même lointaines [sic], entre les unions homosexuelles et le dessein de Dieu sur le mariage et la famille » (n° 251 d’Amoris lætitia)
  • en parlant d’actes « intrinsèquement désordonnés » même lorsqu’il se vivent dans la fidélité et dans un corps à corps autant que dans un cœur à cœur (n° 2357 du Catéchisme de l’Église catholique).

Chaque jeune LGBT ayant foi en Jésus-Christ veut arriver comme tout autre « à effectuer, en dialoguant avec le Seigneur et en écoutant la voix de l’Esprit, les choix fondamentaux, à partir du choix de son état de vie », « mettre en valeur au mieux ses dons et ses possibilités », « dans la logique du don généreux de soi » [3]. Or comment le pourrait-il/elle au sein de l’Église catholique puisque les jeunes homosexuel-le-s y sont officiellement exclu-e-s de deux des états de vie proposés : le mariage et la prêtrise.

Nous nous réjouissons cependant que le texte indique que la différence entre le genre peut être « à l’origine de forme de domination, d’exclusion et de discrimination dont toutes les sociétés ont besoin de se libérer » [2]. Mais en plus de lutter contre toute forme de sexisme qui nourrit également l’homophobie, nous ajoutons que toutes les sociétés ont également besoin de se libérer d’un hétérosexisme* qui considère que le seul et unique bien serait dans l’hétérosexualité. Car à cause de cela « nombreux sont ceux qui vivent dans des situations de vulnérabilité et d’insécurité, avec un impact sur leurs parcours de vie et sur leurs choix » [2].
Les activités pastorales à destination des jeunes restent souvent en France des vecteurs importants de discours homophobes (notamment à travers les propositions « amour/sexualité » qui sont assez incontournables et dans lesquelles on peut trouver un peu tout et n’importe quoi…).

Nous espérons que les Églises à travers le monde ajusteront leur regard sur l’homosexualité afin qu’elles puissent « rencontrer, accompagner, se préoccuper de chaque jeune, sans en exclure aucun » et ne pas « les abandonner aux solitudes et aux exclusions auxquelles le monde les expose » [3].
Et nous faisons nôtre que « le profil idéal de celui qui accompagne un jeune dans son discernement vocationnel » [3] est d’être « sans peur de s’élever contre les préjugés les plus répandus » [3].
Nous faisons ainsi nôtre également l’invitation du pape François « à sortir, avant tout, des rigidités qui rendent l’annonce de la joie de l’Évangile moins crédible, des schémas où les personnes se sentent étiquetées, et d’une façon d’être Église qui, parfois, paraît anachronique » [4].
Nous espérons ainsi que les jeunes LGBT, où qu’ils soient, pourront de plus en plus avoir accès à des activités pastorales qui répondent à leurs attentes et à leurs besoins, sans avoir à taire leur orientation sexuelle ou leur identité de genre, sans avoir à faire face à des discours fermés ou ambigus, des discours excluant.

Denis

[1] Citations issues de l’introduction du document préparatoire
[2] Citations issues de la partie « Les jeunes dans le monde d’aujourd’hui »
[3] Citations issues de la partie « Foi, discernement, vocation »
[4] Citation issue de la partie « L’action pastorale »

* hétérosexisme : Affirmation de l’hétérosexualité comme norme sociale ou comme étant supérieure aux autres orientations sexuelles ; pratiques sociales qui occultent la diversité des orientations et des identités sexuelles dans les représentations courantes, dans les relations et les institutions sociales, entre autres en considérant a priori toute personne comme étant hétérosexuelle ou en tenant pour acquis que tout le monde est intrinsèquement hétérosexuel.

Journée contre l’homophobie avec les paroisses St Augustin et réformée de Rennes

Il suffit parfois de peu, d’un rien, d’un regard, d’un échange de mots qui peinent à sortir, aidés qu’ils sont par un sourire. Cet après-midi là, nous avions préparé, bichonné ce moment que nous voulions intense et grand. Nous avions préparé ce moment avec des hommes et des femmes comme nous, tout en étant différents ! Animés que nous étions d’une foi qui se moque des chapelles et des confessions, mais qui sait où se trouve le bon sens de la vie qui fait s’animer les âmes, qui n’a que faire des différences pavées de bonnes intentions. Différents nous le sommes un peu mais avons appris à nous apprivoiser pour gommer ces différences. Celles de voir un homme avec un homme, une femme avec une femme.
Nous avons toutes et tous dit oui à l’invitation et nous avons osé, nous avons éclairé. Quelques heures, pas plus, mais cela suffit parfois à retrouver les couleurs qui pâlissent, car si le soleil ne se cache pas, les nuages s’amoncellent bien vite sous les regards inquiets qui scrutent et interrogent et peuvent se faire bien lourds derrière les ricanements et les moqueries.
Un à un, une à une, ils sont venus fidèles au poste pour certains d’entre eux, parfois jamais encore venus. Le vin et les victuailles ont envahi la table improvisée sous un soleil que n’ont jamais obscurcit les nuages, au point de nous en faire rougir, mais pas de honte : tout simplement du bonheur d’être ensemble.
Quatre situations posées et des foules de réactions interposées. Il ne fait parfois pas bon d’être homo et de se balader main dans la main. Il ne fait parfois pas bon d’avoir une allure efféminée quand bien même l’on n’est pas homo. Il ne fait parfois pas bon de raconter sa vie le matin au café quand son autre est une femme et que l’on est une femme. Il ne fait parfois pas bon de dire que l’on aime un autre à ses parents qui vous voyaient mari et femme et petits enfants au foyer familial. Autant de situations que nous rencontrons parfois sur notre route et qui vous blessent au jour le jour, qui laissent des peurs dans les regards croisés, des fuites qu’il faudrait éviter.
Les mots écrits se sont alignés les uns derrière les autres au point qu’il fallu rajouter du papier pour que chacun, chacune puisse dire. Les indignés qui veulent agir, interpeller, éduquer. Les compréhensifs qui cherchent à comprendre ce que la victime ressent mais pourquoi l’autre réagit ainsi. Il y a aussi les surpris et les prudents qui se disent qu’il faut du temps, ne rien dire trop vite, que l’on peut avoir du mal à suivre et celles et ceux prêt à embrasser ou à se battre pour que cela cesse enfin.
On peut débattre à l’infini, battre sa coulpe et se dire que l’on fera mieux la prochaine fois. Rentrer dans la coquille de ses peurs ou au contraire casser l’œuf et les plats avec. On peut aussi retrousser les manches et agir.
À la situation d’un lycéen en proie aux moqueries au motif qu’il paraît efféminé : la réponse proposé tourne autour du besoin d’une éducation à la différence, faire un travail de profondeur et sur le long terme sur les préjugés d’une société pour les désamorcer.
À celle d’un couple homo se faisant bousculer parce que main dans la main : éduquer le plus tôt possible à la différence, pas d’autocensure même si ce n’est pas toujours facile, communiquer, s’apprivoiser et quelle place, quel rôle peuvent aussi avoir les églises ?
Parler de son weekend au boulot, en paroisse… qui ne le fait pas… Mais que faire quand les autres comprennent ce qu’ils ne voulaient pas entendre : changer notre regard en parlant de ce sujet plus ouvertement. Les homos ont peut être aussi à changer leur regard sur eux-mêmes, rassurer les gens (face à une peur de blesser), cultiver une posture positive par rapport à leur homosexualité pour faciliter l’échange sur le sujet.
Annoncer que l’on aime à ses parents, quel bonheur… mais pas toujours et quand on est gay ? L’Église catholique devrait pouvoir bénir des unions homosexuelles. Les enseignants sont bridés sur le sujet… Faire connaître les associations (Contact, le Refuge, David & Jonathan, SOS homophobie, le CGLBT).
Des idées qui fusent, des convictions parfois profondes, des esprits qui cherchent à comprendre, mais surtout et avant tout des cœurs qui écoutent et qui aiment. Il fallait pour clore ce moment de vérité une prière guidée par un prêtre et une pasteur et toutes et tous en cet instant réunis. Les intentions portées par chacune et chacun sont venues fleurir un arbre mort des couleurs de l’arc en ciel dont en voici quelques nuances :
• Seigneur, nous te rendons grâce pour les paroles échangées et nous te confions les personnes en souffrance et isolées à cause de leur différence.
• Seigneur, merci pour cet après-midi qui nous aide à changer notre regard sur nos frères différents.
• Pour les parents des personnes homosexuelles, pour qu’elles ne rejettent pas ces personnes et qu’elles accueillent chacun comme un enfant bien aimé du père.
• Pour que nos différences nous enrichissent les uns les autres.
• Que l’amour de Dieu remplisse le cœur et les pensées de tous les hommes sur toute la terre, afin qu’ils s’acceptent avec leurs différences.
• Apprends à accueillir l’autre tel qu’il est et se reconnaître comme étant notre frère.
• Seigneur, aide les parents d’enfants homosexuels à comprendre qu’ils n’ont pas choisi leur orientation sexuelle et que leur amour inconditionnel est l’une des conditions de leur bonheur futur.
• Je te prie pour que plus jamais personne ne se sente exclu, rejeté à cause de sa différence. Merci de nous créer tous différents.
• Pour des personnes persécutées dans certains pays actuellement au point de mourir pour leur homosexualité.
• Prions pour que nos mots et nos gestes ne soient pas blessures et violence.

Un moment de grâce qui n’est pas dû à la chance d’une loterie de hasard mais aux souffrances et aux blessures accumulées. Un tirage qui n’a rien d’un triste sort mais un tissage d’amour, de compréhension et d’amitiés entre nous toutes et tous qui étions là réunis.

Jean-Louis et toutes celles et ceux qui étaient là présents ce dimanche 21 mai 2017.

À propos de la position de l’Église catholique sur l’homosexualité

Réponses à des questions d’une journaliste sur la position de l’Église catholique sur l’homosexualité par Denis et Jean-Louis

• Comprenez-vous la position de l’Église sur l’homosexualité ?
Non
• Est-ce que vous lui en « voulez » ?
Oui car pour condamner l’homosexualité, l’Église fait référence à des textes bibliques, ou non, dont on sait pertinemment qu’ils ont été écrits dans un contexte qui ne visait pas à condamner une orientation sexuelle ; alors que l’Église ne tient pas compte du message évangélique qui n’y fait pas référence et qui sont les textes fondateurs de notre foi chrétienne.

• Pour l’Église, toute personne homosexuelle est appelée à vivre chastement dans le célibat… Qu’en pensez-vous ?
Nous ne choisissons pas notre orientation sexuelle et on voudrait nous retirer du fait de cette différence une part de l’humaine condition qui s’accomplit aussi dans la sexualité… Cela ne traduit-il pas un malaise récurent des hommes d’Église à ce sujet ?
• Et si vous vivez en couple, que répondez-vous à cette affirmation ecclésiale ?
Elle n’a rien d’évangélique et va à l’encontre de l’épanouissement d’un couple quel qu’il soit.

• Quelles évolutions sur les positions de l’Église (par rapport à l’homosexualité) espérez-vous pour les années à venir ?
Être considérés comme des personnes et des couples comme les autres. La vraie évolution viendra d’un changement de position sur la sexualité en général.

• Trouvez-vous parfois l’Église hypocrite quand elle parle d’homosexualité ?
Oui parce qu’elle manipule « bienveillance » et « mise à l’index ». Une forme de pharisianisme dénoncée par le Christ en son temps.

• Un mot sur le pape François… que vous inspire-t-il (sur ce sujet notamment) ?
C’est un homme qui, de par son attitude qui se veut proche de la réalité de la vie des gens, a apporté de l’oxygène aux personnes homosexuelles qui étouffaient et s’éloignaient sous les autres pontificats. Mais son « qui suis-je pour juger ? » montre les limites de l’évolution qu’on lui prête : son attitude évangélique de ne pas condamner le pécheur qui a suscité de l’espérance, montre cependant qu’il considère toujours l’homosexualité comme un péché !
Ce qui explique les positions qu’il adopte ou qu’il laisse adopter, au point qu’il a ajouté aux textes du Magistère la négation de nos couples et de nos familles (« aucun fondement pour assimiler ou établir des analogies, même lointaines (sic), entre les unions homosexuelles et le dessein de Dieu sur le mariage et la famille » exhortation apostolique Amoris lætitia au n° 251)

• Comment avez-vous trouvé personnellement (si vous l’avez trouvée !) votre place dans l’Église ? En surmontant quels obstacles (si obstacles il y a ou il y a eu !) ?
Denis : J’ai quitté l’Église catholique malgré ses richesses car son rapport à la vérité me semble piégé par « l’infaillibilité » qu’elle veut sans cesse trouver dans son enseignement y compris quant elle parle de sexualité.
Jean-Louis : J’ai trouvé une place tant que je ne me suis pas affiché comme tel. Le jour où j’ai pris conscience que je ne pouvais plus cacher cela, je me suis éloigné.

• Est-ce que vous constatez qu’il y a plusieurs formes d’homosexualité, ou est-ce absurde d’essayer de les différencier ?
Que ne dirait-on pas si on demandait à un couple hétéro qu’elle est sa forme d’hétérosexualité. On serait dans l’absurde, non !?

• Est-ce que le Christ vous aide à vivre plus heureux ?
Clairement oui, car à qui irions-nous, il a les paroles de vie éternelle.

Réponse à l’exhortation apostolique du pape

Pape François

Je vous envoie cette lettre au nom de tous les miens. Il est possible que vous ne lisiez pas ces mots et que d’autres le feront pour vous. Il est possible également que je n’aurais pas de réponse à cette bouteille jetée à la mer mais qu’importe…
Je réagis à votre exhortation apostolique post-synodale Amoris laetitia sur l’amour dans la famille in Certaines situations complexes du chapitre 6. Déçu je suis, déçu je reste, non pas tant du propos attendu et convenu que de l’espoir que vous aviez fait naître en nous. Tant pis ! Ce seront donc les mots de cette exhortation que je commenterai.
Je n’ai que faire du respect demandé et de la dignité que vous daignez accorder à « la personne qui aurait des tendances homosexuelles » que je suis. Vous confondez, bon père, les tendances de la nature humaine à la nature d’un être humain ! Ceux qui ont des oreilles qu’ils entendent…
Pour ce qui est du couple homosexuel il n’y a dites vous « aucun fondement pour assimiler ou établir des analogies, même lointaines, entre les unions homosexuelles et le dessein de Dieu sur le mariage et la famille ». Et bien pourtant, je vous assure, moi qui suis en couple avec mon compagnon, que nous avons bien les mêmes soucis du lever jusqu’au coucher. Nous faisons la vaisselle, le ménage, les courses. Nous faisons la fête en famille réunie par le couple gay, pleurons nos proches disparus. Nous dormons dans le même lit qu’il nous faut faire chaque jour que Dieu fait et nos corps se rejoignent dans un désir d’amour qui s’accomplit et se respecte. Nous savons nous disputer, parfois nous éloigner mais pour mieux revenir l’un à l’autre et que cela plaise ou non, nous sommes liés l’un à l’autre comme le tenon à la mortaise. Les différences de sexes ne font pas plus les couples qu’une bague que l’on passe au doigt de l’autre. Les couples naissent d’une étincelle qui jaillit dans les cœurs qui s’unissent et Dieu m’en est témoin, il faut sacrément ramer par la suite pour l’entretenir ce feu qui embrase nos vies ! La différence des sexes qui, à vos yeux, fonde les couples est ce que vos yeux sont capables de voir, mais aveugles devant « la joie de l’amour » que nombre d’homosexuel-le-s vivent. Et pourtant « Heureux ceux qui croient sans avoir vu !
Je constate avec amertume que le figuier entre vos mains n’aura pas cette année porté de fruits pour nous. Mais nous porterons encore la cognée à la charrue, soyez en sûr. Nous sommes des enfants de Dieu issus de couples que vous savez voir et reconnaître. Je crois à votre amour à votre tendresse et à votre attention envers les souffrants, tous les souffrants de ce monde dont je fais, avec les miens, partie, non pas à cause de notre orientation sexuelle mais à cause du refus de voir l’amour que nous portons et offrons jusque dans nos couples. Puissent ces mots s’élever entre ciel et terre et atteindre votre cœur.

Fraternellement en Christ
Jean-Louis00croix